lundi 6 décembre 2010
Don't cry Baby...
********
Ceci est la première page d'une histoire que je suis en train d'écrire, toute ressemblance avec des personnages connus est sûrement inconsciente, et ceci est une fiction...d'anticipation. merci de me donner votre impression.
********
Le son grave du violoncelle glissait sur les accords réguliers et doux du piano. Macha écoutait l'élégie de Fauré chaque fois qu'elle prenait le train. Cela s'accommodait bien avec son humeur: légère et profonde, enlevée et énergique par instant, rythmée et soutenue, chantante et mélodieuse. De fins écouteurs la reliaient à son ordinateur dont elle ne se séparait pas souvent.
Et puis, quelques chansons, quelques musiques, il fallait occuper le temps.
Elle avait l'esprit libre, ses pensées vagabondaient, tandis qu'elle observait les arbres dorées de la campagne à l'automne. Elle avait toujours son appareil photo, avec elle, car quand l'envie la démangeait, elle ne supportait guère de ne pas l'avoir, tellement était important pour elle de fixer les images qui la charmaient. C'était une façon de braver le temps, de marquer la mémoire.
Dans le train, comme bercée par le bruit du rail, elle aimait écrire. Avec un ordinateur, on peut presque tout faire. Dans le ciel, elle vit dans le fond azuréen, un magnifique nuage en forme de colombe qui se transformait petit à petit, s'étirant en voile léger sur un air de Madeleine Peyroux, don't cry baby....
Soudain, une détonation fulgurante. Un éclair étrange, un sifflement terrifiant....tout se disloqua brutalement. Une vibration inquiétante se transforma aussitôt en secousses irrépressibles. Le choc qui suivit la déflagration fut terrible. Le silence presque immédiat fut émaillé de pleurs et de râles des quelques survivants.
Macha ouvrit les yeux. Elle s'était agrippée tant bien que mal à son fauteuil. Elle avait tellement serré les mâchoires qu'un filet de sang coulait de la commissure de sa bouche. Elle ne sentait rien, mais elle voyait bien qu'elle ne pouvait plus bouger ni bras, ni jambes. Comme prostrée, secouée, elle essayait juste de garder son calme, de sentir sa respiration, elle entendait les pulsations de son coeur dans ses oreilles bourdonnantes. Elle se rassura ainsi: je dois être vivante, se dit-elle aussitôt.
Ses yeux se dirigèrent vers le plafond qui s'ouvrait sur le ciel, le fauteuil devant elle s'étant abattu violemment sur son corps, plié, recroquevillé; elle tenta un mouvement de tête et c'est à ce moment précis qu'elle perdit connaissance.
Elle n'entendit pas les sirènes qui hurlaient de désespoir et de colère, elle ne vit pas les visages des personnes qui l'extirpèrent de la carcasse fumante, elle ne put se rendre compte de la détresse des quelques survivants qui avaient eux, assisté à tout...les corps calcinés, les enfants pleurant leur parents inanimés, la mère éplorée, les yeux hagards, perdus, fondant en larmes sur le petit corps de l'enfant atrocement mutilé.
C'est le bip régulier du scope qui accompagna son réveil. Macha avait sombré dans un coma profond pendant 10 ans. Lorsqu'elle s'éveilla elle avait atteint l'âge de 38 ans. Nous étions en novembre 2022.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
5 commentaires:
Ainsi, Astrale, toi qui prends souvent le train, tu tentes d'exorciser tes fantasmes apocalyptiques en te lançant dans la fiction. C'est bien ça, n'est-ce pas ?
peut-être! mais en tout cas, je prends plaisir à écrire.
Je me surprends même à prendre des notes quand une idée me vient, comme un dessinateur avec son carnet de croquis. Tout le monde a des idées, seulement 10% d'entre nous les notes!! Et toi? fais tu partie des 10%, Yves?
Non, Astrale, j'ai pas mal de défauts, j'accumule pas mal de tares, mais je ne souffre pas encore de graphomanie. Ce qui me place, pour une fois, dans les rangs de la majorité ;-)
Je fais partie des 10% ! Je "photographie" mentalement tant de choses que je ne pourrais me souvenir de tout !
J'aime ton texte. Quiconque prend les transports parisiens y pense, un jour ou l'autre. Encore plus quand on a un père qui a travaillé des années comme démineur et dont c'était le boulot d'empêcher des attentats, sans beaucoup dormir pendant les années noires du RER Saint Michel et autres ...
Ton texte est très réaliste, Astrale.
merci de ton témoignage et de ton com Fiso!
Enregistrer un commentaire